Photos by Laurence von der Weid.
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From the very beginning, it is evident that Werner Herzog, the mysterious German figure in the world of Art, values precision. This is something he emphasizes within the first moments of our meeting. At 82 years old, he is in Paris for a brief 48 hours for the release of the French version of his memoir, Every Man for Himself and God Against All. With limited time on his hands, Herzog wastes no time, showcasing the same focus and determination that has characterized his long and illustrious career.
Having written, produced, and directed eighty films, as well as delving into acting, opera staging, and book writing, Herzog’s work has taken him to various exotic locations around the world. Yet, on this particular afternoon, he sits across from me in a Parisian hotel, exuding a gaze that reflects a combination of madness, clarity, and freedom.
Before I even started recording our conversation, Herzog declared, « I don’t want to talk about my films. » This statement, coming from a man who has created some of the most controversial and remarkable cinematic works such as Aguirre, The Wrath of God, Nosferatu The Vampyre, and Grizzly Man, was initially puzzling.
I couldn’t help but marvel at the audacity, resilience, and sheer daring required to move a 340-ton steamship over a mountain in the jungle for his film Fitzcarraldo
As the year draws to a close, Herzog continues to make an impact with the release of the paperback and audiobook versions of his memoir, as well as a retrospective of his films at the Pompidou Center in Paris. It is evident that Herzog, a master storyteller, lives and breathes through his narratives with unparalleled intensity.
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Ayşegül Sert: I noticed that you often use a particular « formula » in your conversations, such as the one you mentioned last night at La Maison de La Poésie: « Films are my voyage, and writing is home. »
Werner Herzog: Please be more specific. While I do say that, I also mentioned last night that my prose will outlive my films.
AS: How so?
WH: I just know it. And that’s sufficient.
AS: You have a sense of it? Is that what you mean?
WH: No, I don’t sense it. Knowing is different.
AS: You started writing poetry at a young age, followed by filmmaking and screenwriting.
WH: I wasn’t aware of cinema until I was eleven. Writing came before my filmmaking endeavors. By the age of eighteen, I had accumulated two and a half kilos of text. My first film was made at nineteen, and I have always written my own scripts.
AS: What is it about writing that sets it apart from other art forms?
WH: It’s not about surpassing other art forms, but rather a different mode of storytelling. Writing is perhaps more direct compared to the intricate processes involved in filmmaking. When you write, it’s simply about the act of writing.
AS: Your book ends abruptly and without a definitive conclusion. Can you elaborate on your approach?
WH: I don’t meticulously plan my writing. The words flow naturally from within me. My memoir is a reflection of my life, so the narrative comes effortlessly as I recount my experiences without the need for embellishment.
I can write anywhere, whether it’s amidst a noisy bus ride with rowdy football fans or during mundane tasks like doing my taxes. Memories are subjective and malleable, and I acknowledge that my recollections may be influenced by personal biases.
AS: In your book, you reference André Gide and Shakespeare in relation to the distortion of truth in storytelling. Do you believe that writers can never fully capture the essence of their past experiences due to the fallibility of memory?
WH: Anyone claiming to possess absolute truth is not worth listening to. Gide’s insights on manipulating facts to convey a deeper truth are profound. Memories are subjective constructs, and our ability to reshape them is essential for coping with life’s complexities.
During the production of my documentary on the internet and artificial intelligence, a prominent neuroscientist highlighted the fallibility of memory, reinforcing the notion that our recollections are inherently flawed.
Il a déclaré: « Il n’y a pas de vérité dans le cerveau humain. » AS: Cela signifie-t-il que rédiger un mémoire est chercher une vérité qui ne peut jamais être atteinte? WH: Admettons-le, nous ne savons pas ce qu’est la vérité. Il m’a fallu beaucoup plus de temps pour vérifier les faits après avoir écrit mon livre que pour l’écrire. AS: Votre réponse aux jeunes qui viennent vous demander des conseils sur la réalisation de films et sur l’écriture est en deux parties – vous leur dites de marcher, car le monde se révèle à ceux qui voyagent à pied, et vous leur dites de « lire, lire et lire! » WH: Pour moi, les Géorgiques de Virgile sont probablement le plus grand poème jamais écrit; il est long, il parle de l’agriculture et de la vie à la campagne, et ce qui est étonnant chez lui, c’est qu’il n’est jamais vraiment descriptif mais il nomme la gloire de la ruche et des pommiers, il nomme l’horreur de la peste qui envahit. AS: Vous parlez plusieurs langues, mais vous écrivez principalement en allemand. Lorsque vos livres sont traduits, lisez-vous les manuscrits traduits et faites-vous des suggestions avant l’impression? WH: Oui, mais ma connaissance des langues est limitée, peut-être huit ou neuf langues, et deux d’entre elles ne sont plus parlées [le latin et le grec ancien]. AS: Vous avez vu de nombreux endroits, périodes et changements politiques. Diriez-vous que l’histoire se répète? WH: Ce serait une façon superficielle de voir les choses. Si vous regardez en arrière dans l’histoire, les siècles précédents étaient plus laids et plus violents qu’aujourd’hui, la différence est qu’aujourd’hui il y a des armes atomiques, ce qui est un seuil et les gens sont devenus insouciants et oublieux d’Hiroshima et de Nagasaki. AS: George Orwell dans « Pourquoi j’écris »: Quelle est votre motivation pour écrire? WH: Je n’ai jamais lu Orwell. L’écriture n’est pas pour moi une question de compréhension. L’écriture est pour la joie de raconter des histoires. Les gens pensent que le cinéma a du pouvoir, mais non, il n’en a pas. Le vrai pouvoir vient de deux choses: les orateurs, qui ont des microphones, les grands orateurs. Et l’autre, ce sont les fusils, les armes. C’est ce qui change le monde. Les livres, oui, dans une certaine mesure, car ils aident à former des perspectives, mais nous ne devrions pas surestimer le pouvoir nu de l’écriture. AS: Qu’est-ce qui attend Werner Herzog? WH: J’écris un nouveau livre et je travaille sur deux autres projets – un documentaire et un long métrage. AS: Pas mal pour un octogénaire qui écrit dans ses mémoires: J’étais profondément convaincu que je ne vivrais pas jusqu’à mes dix-huit ans. Une fois que je l’avais passé en toute sécurité, il semblait inconcevable que je puisse être plus âgé que vingt-cinq ans. Le résultat a été que j’ai commencé à réaliser des films dont je pouvais supposer qu’ils seraient tout ce qui resterait de moi.
Une lumière dans les films et les livres de Werner Herzog
Il arrive que, avec mes films, certaines personnes se sentent presque illuminées, et c’est la même chose avec mes livres. Si elles deviennent une compagne, ce serait merveilleux, et cela arrive, je le sais.
(Cet entretien a été condensé et édité pour plus de clarté.)
Chaque homme pour lui-même et Dieu contre tous de Werner Herzog est disponible en anglais via Penguin et en français via Les Éditions Séguier.